Université de Dschang : le département d’Histoire tient sa première Thèse de doctorat/PHD

21 juin 2014

Université de Dschang : le département d’Histoire tient sa première Thèse de doctorat/PHD

Le-jury-présidé-par-le-Pr-Daniel-Abwa. (Crédit photo: Ulrich Tadajeu)
Le-jury-présidé-par-le-Pr-Daniel-Abwa. (Crédit photo: Ulrich Tadajeu)

La toute première soutenance de Thèse de Doctorat en Histoire/PHD estampillée Université de Dschang a eu lieu le 19 Juin 2014 dans la salle des spectacles et conférences de cette institution. Giuliana Quartullo, formée en Histoire de l’art en Italie et en service jusqu’en 2009 au ministère italien des affaires étrangères, a ouvert ce bal avec une thèse portant sur l’histoire de l’art et intitulée «Art et artisanat à Dschang: du sacré à la profanation : 1907 – 2012 ». Devant un jury interdisciplinaire constitué des maitres en histoire (Pr. Daniel Abwa, Pr. Albert Pascal Temgoua, Pr. Albert François Dikoumè, Dr. Zacharie Saha) pour examiner la dimension historique de ce travail et des professeurs d’art et de philosophie (Pr. Raymond Fofie, Pr. Charles Robert Dimi) pour évaluer la dimension esthétique de la thèse, elle a présenté les résultats de son travail.

SAMSUNG CAMERA PICTURES
Giuliana Quartullo explique le contenu de sa thèse aux membres du jury. (Crédit photo: Ulrich Tadajeu)
Les-membres-du-jury. (Crédit photo: Ulrich Tadajeu)
Les-membres-du-jury. (Crédit photo: Ulrich Tadajeu)

C’est pour rompre avec les préjugés occidentaux sur l’art africain que Giuliana Quartullo a entrepris de mener cette recherche. Elle mène son étude sur deux grandes périodes de l’histoire africaine  à savoir la période coloniale puis la période postcoloniale. Les résultats ont été obtenus après avoir déployé une méthodologie bien élaborée. Elle a réalisé des entretiens, visité des villages et des musées au Cameroun. Elle a également visité des musées en Europe où se trouvent des œuvres d’art africaines. Enfin, elle a administré des questionnaires.

A la fin de cette enquête de terrain, les résultats obtenus indiquent que l’art dans la Menoua a évolué du sacré à la profanation. Il n’est plus le domaine réservé de l’artiste initié.  Selon Giuliana Quartullo, l’Eglise, l’Ecole et le capitalisme colonial ont joué un rôle très important dans la profanation de cet art. En contexte colonial, il fallait s’attaquer aux populations autochtones. Or avant de s’attaquer au corps, on détruit d’abord l’âme. L’un des éléments essentiels de cette âme c’est la culture à travers une de ses composantes qu’est l’art. Cela s’observe à travers l’histoire par le fait que, autrefois réservé aux chefferies, l’art est progressivement envahi par des normes et pratiques exogènes. A partir de 1945, des expositions publiques sont organisées, les structures publiques sont créées pour conserver les œuvres d’art. Elle cite notamment le cas du musée public de Dschang crée en 1964 et le musée des civilisations qui a vu le jour en 2011. Cette profanation se manifeste aussi par le pillage des œuvres d’art durant les périodes de luttes nationalistes pendant les décennies 1950 -1960. Enfin, il y’a avec le contexte socio-économique la marchandisation de cet art qui perd, selon elle, sa dimension sacrée. Il s’agit d’un contexte marqué par la concurrence relative à la mondialisation.

Giuliana Quartullo reçoit les félicitations des membres du Jury. (Crédit image: Ulrich Tadajeu)
Giuliana Quartullo reçoit les félicitations des membres du Jury. (Crédit image: Ulrich Tadajeu)

Malgré cet état des choses, elle relève qu’il est possible de reconstituer une histoire de l’art de Dschang comme elle essaye de le faire dans sa thèse. Parce que l’art de Dschang est très diversifié de par les apports multiples des savoir-faire des artistes et artisans étrangers. Ce qui a favorisé le rayonnement de l’art de Dschang au Cameroun et hors du pays et, paradoxalement, le vol des objets d’art et la fuite des talents artistiques. Elle a cité à ce sujet les cas des objets d’art de Dschang exposés dans les musées européens et américains. C’est le cas de « l’Akou-Mafo » du groupement Foto. Il est exposé à Zurich depuis 1970. Les poignées de fouet de danse et le masque-buffle de Foreké ont été mis en vente à Paris en 1995.

Après la présentation, le jury a examiné le travail en relevant les qualités humaines, scientifiques et sociales de la candidate. Les examinateurs ont surtout mis l’accent sur les insuffisances méthodologiques de cette thèse. Malgré ces limites, ce travail « novateur et original » est une interpellation à la recherche d’une solution adéquate à la rénovation de l’art camerounais dans un contexte marqué par le capitalisme animiste (tout est transformé en marchandises). Toutes ces qualités lui ont valu la mention très honorable.

Partagez

Commentaires